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Photo de Frank Pons

Sport professionnel et sens des affaires: un mariage de raison

En ce début 2012, je partage avec vous certaines réflexions sur le marketing du sport, un domaine qui me fascine depuis quelques années comme chercheur, mais aussi comme passionné et fervent pratiquant de sports variés.

Marketing du sport vs marketing par le sport
Avant de débuter, il est important de distinguer le marketing du sport (la mise en marché d’une activité sportive comme le sont les Canadiens ou nos ex-futurs Nordiques) du marketing par le sport (où l’on utilise le sport et ses attributs uniques en termes émotionnels et d’intensité pour vendre des produits connexes et qui concerne la commandite ou le placement publicitaires comme lors du Superbowl).

On dit souvent dans le marketing du sport que mettre en marché un sport ou une équipe professionnelle présente un challenge énorme. En effet, même si le sport permet de créer un lien émotionnel fort et profond avec les consommateurs (fans) et d’offrir une multitude d’options de mise en marché pour le gestionnaire marketing, c’est également un produit (une expérience) éphémère, unique, aléatoire et périssable. Il est ainsi impossible de garantir une victoire, un beau match, des buts, même la présence des acteurs (blessures) et, une fois le match fini et le score connu, sa valeur devient quasiment nulle.

Si l’on ajoute à cela l’importance des victoires et des défaites sur la perception qu’ont les fans de l’équipe, mettre en marché un tel produit devient un véritable casse-tête. Les gestionnaires marketing doivent donc se focaliser sur ce qu’ils peuvent contrôler (l’accueil, l’animation, le confort, l’expérience…), bref toutes les activités entourant le match. Ils ont une multitude d’outils à leur disposition (technologie, aréna, concessions, merchandising, ressources humaines…) dont ils doivent faire la meilleure utilisation en suivant une planification stratégique rigoureuse.

Et les hommes (femmes) dans tout ça…
Parmi ces outils, la dimension humaine et la manière dont les joueurs et le staff (le cœur de l’organisation) sont présentés au public sont des éléments critiques, et cela, malgré la difficulté de miser sur des relations durables (échanges et congédiements) ou sur des athlètes pas toujours contrôlables (Tiger Woods, Kobe Bryant…). Ainsi, même s’ils ne sont pas au centre de leur stratégie de mise en marché, certaines organisations s’assurent, à travers la visibilité ou les valeurs symbolisées par leurs joueurs ou dirigeants, de véhiculer une image positive et cohérente du club.

Les exemples ne manquent pas à l’étranger, notamment dans le monde du soccer professionnel où le Paris Saint-Germain vient de se payer Carlo Ancelotti, un des entraîneurs ayant le meilleur palmarès au monde (et aussi un des plus chers), de même qu’une multitude de joueurs (incluant potentiellement David Beckham), afin de montrer le sérieux des propriétaires qataris pour placer le club parmi l’élite mondiale. D’autres exemples, pas forcément financiers, comme Liverpool (l’ancien club de M. Gillett, ex-propriétaire du Canadien) qui a engagé Kenny Dalglish, une ancienne gloire du club, pour entraîner ce club historique et ainsi symboliser (à moindre coût) la tradition de valeur, de travail et de fidélité de ce club légendaire et faire oublier la période précédente avec un entraîneur espagnol (de qualité) Rafael Benitez qui n’avait plus de résultat… Il est évident que la construction de la marque passe par ses porte-drapeaux (en premier lieu les joueurs et les dirigeants). On ne peut pas choisir un joueur ou un entraîneur selon des critères de mise en marché seulement, mais, à valeur égale ou proche, on se doit de penser à ce que notre organisation représente et de faire des choix professionnels pour renforcer cette image.

Au cours des dernières années, j’ai rencontré plus d’une quinzaine de vice-présidents ou de directeurs marketing dans la MLS (Major League Soccer, qui s’en vient à Montréal: un petit papier sur cela bientôt), la NBA, la MLB, la NHL, la Ligue 1 (ligue de soccer professionnelle en France), mais aussi des organisateurs de tournoi ATP (tennis professionnel). Bien souvent, la différence dans les succès marketing de leurs équipes s’expliquent par l’existence d’une cohérence et d’une vision de ce que leur organisation représente ainsi que de la façon de présenter au public cette vision et de la mettre en place, notamment en impliquant leurs troupes (joueurs et entraîneurs). Le Rouge et Or football et sa proximité avec les fans et le professionnalisme que l’organisation a amené au football universitaire sont un autre exemple de cette une vision cohérente et des actions qu’il faut entreprendre pour la maintenir.

Qu’est-il arrivé au Canadien? Faux pas ou changement de cap…
Une des rencontres les plus marquantes pour moi a été celle avec Ray Lalonde, à l’époque vice-président marketing du Canadien, qui pour moi symbolise parfaitement cette image de la compréhension des enjeux sportifs et marketing d’une organisation sportive (demandez à Pierre Boivin et surtout à George Gillett ce qu’ils en pensent -))). Le meilleur exemple de cette compréhension du marché et du rôle que le Canadien joue dans le contexte québécois peut être vu dans toutes les activités mises en place pour le centenaire –un parfait respect des traditions et de l’évolution du club–, mais aussi dans la vidéo ci-dessous (à partir de 2 min 35),
[youtube_sc url= »icFzeFL0Pwg » playlist= »Du français au Centre Bell » width= »600″ ratio= »4:3″]

où les joueurs se présentent eux-mêmes en français… «Je suis Josh…» Un détail, vous me direz? Pas du tout!! Un symbole qui renforce des liens, loin des victoires et des défaites, un véritable attachement, une valeur inestimable… sans doute un des plus gros succès (d’après moi) de Ray Lalonde que de réussir à convaincre joueurs et entraîneurs de s’impliquer.

Une identité se bâtit à coup de patience et de renforcement. Aussi, j’ai du mal à m’expliquer (aux niveaux marketing et communication) la nomination du nouvel entraîneur du Canadien de Montréal. Plus grave encore, j’ai du mal à comprendre la précipitation, le manque de préparation (en termes marketing et communication) et surtout l’absence d’un plan de contingence pour servir de pare-feu et communiquer plus efficacement les raisons de cette nomination et l’ajustement fait par l’organisation pour faciliter cette nomination notamment au chapitre linguistique… Même si la situation s’imposait peut-être au club, le débat qui a suivi aurait dû être anticipé et un axe clair et rationnel aurait dû justifier ces choix s’il n’était pas possible de l’éviter. Dans une période où une équipe gagne moins, une organisation se doit de rester fidèle à ses racines et à ses valeurs pour ne pas perdre ses fans ou du moins pour limiter la perte.

Un tel post dans ce blogue ne vise pas à s’immiscer dans la décision sportive du changement d’entraîneur, mais le sport professionnel est devenu un business (bon ou mauvais) et ignorer ce volet est préjudiciable à toute l’organisation ainsi qu’à la construction et au maintien de l’identité de celle-ci. Il reste à espérer que, pour nos futurs Nordiques, l’essence du passé et la vision du futur soient bien intégrées et que cette nouvelle identité prospère pour des années… Mais faisons confiance au propriétaire du nouveau club pour bien comprendre la nécessité de marier sport et business. De ce côté-là pas trop de soucis, car la surpuissante machine marketing du candidat favori (le héros du Bye Bye 2011) est déjà prête. Alors Let’s go Nordiques de Québec…….OR……..OUPS -)))).

D’autres posts de marketing sportif dans les prochaines semaines. À suivre…

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