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Incursion dans l'univers du jeu

Jeux de hasard, côté sombre

Hasard-299

Un groupe de l'Université cherche à mieux comprendre le jeu pathologique et met au point des outils pour aider les joueurs excessifs.

Ils sont nombreux à tenter leur chance, à l’occasion. Au moins une fois par année, les 2/3 des Québécois misent sur le hasard (et parfois sur leur «science») pour convertir un petit investissement en un gros gain. Acheter un billet de loterie, glisser quelques dollars dans une machine ou jouer au poker en ligne, ça procure du plaisir et ça permet de rêver. Mais pour certains, le rêve finit par tourner au cauchemar! Quand le jeu dérape, devient pathologique, il n’y a plus rien de plaisant… Professeure à l’École de psychologie et jusqu’à récemment directrice du Centre québécois d’excellence pour la prévention et le traitement du jeu1, Isabelle Giroux2 apporte un éclairage sur ce côté sombre des jeux de hasard et d’argent.

Pouvez-vous nous tracer un bref portrait de la situation?
Sur les 66% de Québécois qui jouent, d’une année à l’autre, la plupart sont des acheteurs de billets de loterie. En fait, gratteux, 6/49 et produits apparentés se retrouvent dans les poches d’environ 60% des adultes, occasionnellement. Les machines à sous arrivent loin derrière dans les habitudes, avec un peu moins de 10% de joueurs, et les appareils de loterie vidéo ainsi que le poker suivent avec près de 5% respectivement. Bien sûr, plusieurs sont adeptes de toutes ces formes de jeux à la fois. Dans l’ensemble de la population, environ 2 personnes sur 100 ont des problèmes de jeu ou risquent d’en avoir. Ça ne paraît pas énorme, mais les conséquences sur leur vie peuvent être dramatiques. Et tout le monde peut être touché, bien que ce soit davantage le cas des hommes et des gens de milieux socioéconomiques défavorisés. C’est chez les adeptes de loterie vidéo qu’on trouve la plus forte proportion de joueurs pathologiques ou à risque de le devenir. Ceux qui jouent en ligne (au poker surtout) s’avèrent par ailleurs plus à risque que ceux qui jouent de façon traditionnelle.

::Isabelle Giroux

Isabelle Giroux

Quelles sont ces conséquences potentiellement dramatiques dont vous parlez?
Le jeu pathologique affecte toutes les sphères de la vie d’une personne. Par exemple, la relation conjugale peut être mise à rude épreuve, l’absentéisme au travail devenir un réel problème, le cercle d’amis se rétrécir, les dettes s’accumuler dangereusement, et la dépression puis le désespoir s’installer, jusqu’à de possibles gestes irréparables. Les proches sont souvent sans ressources, parfois même ignorants de la gravité du problème, puisque le joueur vit fréquemment dans le déni et le mensonge.

Qu’est-ce qui l’amène à consulter, alors?
Arrive un moment où il commence à trouver que quelque chose ne va plus dans sa vie. Il est constamment préoccupé par le jeu: où vais-je pouvoir jouer? quand? comment trouver l’argent? comment puis-je me refaire? Après une première phase gagnante (de petits montants) où il a cru erronément en son habileté à battre le système, le joueur connaît une phase de perte (de montants de plus en plus gros). Mais il est convaincu que ce n’est que temporaire, que la chance et son habileté vont de nouveau le mettre sur la voie gagnante. Et il en arrive bientôt à une phase de désespoir. Ce sont ses dettes qui l’amènent d’abord à consulter, puis ses problèmes conjugaux, parfois aussi les pressions des proches. Mais il est rare qu’il se présente en couple. Souvent, il va chercher de l’aide à l’insu de sa famille.

Les joueurs de poker se comportent-ils de la même façon à cet égard?

1 Le Centre québécois d’excellence pour la prévention et le traitement du jeu (CQEPTJ) est un centre de recherche de l’Université Laval.

2 Isabelle Giroux est aussi directrice du Groupe de recherche sur l’intervention et les fondements en jeu (GRIF-JEU), une équipe multiuniversitaire.

Publié le 20 avril 2016

  1. Publié le 22 avril 2016 | Par Jean Laliberté

    Très bon texte et surtout très réaliste. Merci...

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