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Hiver 2005

La victoire des entraîneurs

Une incursion dans le monde des formateurs du Rouge et Or.

    La mission des entraîneurs du Rouge et Or ne prend pas uniquement sa source à la fontaine de la performance. Et même s’ils aiment gagner, ces travailleurs de l’ombre préfèrent donner à leurs étudiants-athlètes un stimulant extramusculaire à base de dépassement, courage, honnêteté et fierté.

Le sport d’élite

Douze clubs Rouge et Or (athlétisme et cross-country, badminton, baseball, basketball, football, golf, natation, plongeon, ski alpin, soccer, triathlon, volleyball) se partagent le programme d’excellence sportive et leurs étudiants-athlètes s’entraînent quotidiennement au PEPS.

Un programme basé sur la poursuite de l’excellence et de la performance et qui vise à permettre aux étudiants de cheminer sur le plan académique. Un «effet d’entraînement», pour emprunter au slogan de la campagne publicitaire du PEPS, qui ne promet donc pas que la réussite sportive.

Et tous les entraîneurs se rejoignent dans ce désir d’inculquer à leurs étudiants-athlètes des valeurs qui s’élèvent au-dessus de la simple victoire, que Linda Marquis (entraîneure de l’équipe féminine de basketball) qualifie même d’«éphémère».

Partenariat et cogestion

Chaque club du Rouge et Or est constitué en corporation sans but lucratif. Un partenariat et une cogestion ont été conclus entre l’Université Laval et chacune des 12 corporations. L’Université demeure la gardienne des valeurs et la répondante officielle auprès des organismes de régie du sport universitaire et de toutes les institutions universitaires québécoises et canadiennes. Elle met à disposition ses installations sportives et soutient chaque club dans ses opérations quotidiennes.

De concert avec les conseils d’administration, elle recrute et sélectionne les entraîneurs et assure leur supervision. Elle veille au respect du réglement régissant les réseaux autant que ceux déterminant sa participation.

De leur côté, les corporations procèdent à la prospection de généreux partenaires privés, coordonnent les activités de financement et l’organisation des rencontres locales. De plus, elles signent les contrats des entraîneurs. Un modèle de partenariat et de cogestion qui s’est révélé particulièrement efficace, selon Gilles D’Amboise, directeur du Service des activités sportives.

Pourtant, une ombre, celle du statut des entraîneurs, ternissait quelque peu le tableau. «Cela fait des années, avoue Gilles D’Amboise, que nous étions conscients du problème et c’est pourquoi nous avons tout mis en œuvre pour remédier à la précarité d’emploi dont souffraient beaucoup d’entraîneurs.» Une précarité qui, selon Pascal Clément, a dû refroidir de nombreux athlètes dans leur ambition de devenir entraîneurs.

Traitement de pros

 «Nous avons revu l’ensemble du système qui régissait l’embauche des entraîneurs mais aussi leur évaluation en fin de contrat», souligne non sans fierté Gilles D’Amboise. L’objectif de l’exercice était d’offrir aux entraîneurs du Rouge et Or des conditions similaires à celles dont bénéficie le personnel professionnel de l’Université Laval, c’est-à-dire un salaire correspondant à leur compétence et l’octroi d’avantages sociaux.

Même si les entraîneurs tels que Dany Boulanger (23 ansde présence à l’Université) et Linda Marquis (20 ans d’ancienneté) clament bien haut qu’ils ne font pas «ce boulot pour de l’argent», il n’empêche qu’ils se réjouissent de cette forme de reconnaissance dont ils vont enfin bénéficier.

Par ailleurs, Gilles D’Amboise souligne combien le modèle actuel mis en place a été mûrement réfléchi et résulte d’une consultation tripartite entre les conseils d’administration des clubs, les entraîneurs et l’Université.

La refonte a été totale. De la sélection d’un entraîneur à la définition de ses tâches tout au long du contrat, l’ensemble du processus a été révisé. Résultat? Les critères de qualité se sont trouvés rehaussés surtout en ce qui concerne l’expérience de l’entraîneur.

De même, la grille d’évaluation de rendement des entraîneurs tout au long de leur contrat de trois ans comprend des fonctions de gestion, de contribution professionnelle, de développement régional et de tâches connexes. «Nous mesurons la performance d’une façon globale, précise Gilles D’Amboise. Et à la fin de chaque année, nous allons procéder à une évalutation en collaboration avec l’entraîneur lui-même.» Un gage de transparence et d’échanges fructueux.

 Adieu donc précarité et incertitude pour les pédagogues de l’école de la vie, qui vont enfin pouvoir former une relève et faire briller davantage les couleurs du Rouge et Or.

***

LANCER FRANC

La silhouette d’adolescente de Linda Marquis disparaît dans le cercle formé par ses joueuses de basketball. Nous sommes à l’entraînement et l’heure est aux explications des phases de jeu. Les visages attentifs des jeunes filles prouvent que ces moments de préparation sont d’une importance capitale.

Depuis 20 ans, l’ex-joueuse du Rouge et Or fait figure d’exemple, car rares sont les femmes à tenir ce rôle (en 2000, Sports Québec a évalué que quelque 28% d’entraîneures québécoises évoluent au sein de différentes fédérations sportives).
 
Non, la profession d’entraîneure ne représente pas une carrière de tout repos et exige bien de la passion (et une certaine dose d’abnégation) pour s’y délecter et trouver l’énergie nécessaire à sa bonne conduite. Certes, la notion de coaching dans une institution universitaire revêt d’autres valeurs à inculquer que la simple victoire d’un titre. «Donner et partager, c’est une chance et un perpétuel défi!», soutient Linda Marquis d’un large sourire.

Sa carrière d’entraîneure est jonchée de reconnaissances et d’honneurs; cependant, Linda Marquis a su conserver humilité et modestie, qui sont les marques d’un cœur généreux. «Semer des graines», faire grandir les jeunes étudiantes-athlètes et leur donner l’occasion unique de développer leurs compétences en inculquant les véritables valeurs humaines constituent le terreau de son existence d’entraîneure.

Et lorsque vient le temps d’expliquer «son style», l’entraîneure évoque la préparation et l’exécution. «On ne parvient à rien sans beaucoup de travail et de persévérance. Finalement, il suffit d’avoir confiance en soi-même», précise-t-elle en ajoutant que la meilleure façon de ne pas se tromper aura été de rester toujours authentique.

«Nous savons l’importance que nous avons pour les joueuses et l’influence que nous pouvons exercer», ajoute-t-elle. Une figure de modèle qu’elle ne réfute pas même si elle préfère garder une certaine distance. Car pour Linda Marquis, l’essentiel est de marquer des points dans toutes les phases de la vie.

SAUT DE PRÉCISION

L’œil attentif, Dany Boulanger suit les mouvements du jeune plongeur qui s’élance sur le tremplin pour effectuer un saut dans la piscine du PEPS. Le jeune guette le regard de son entraîneur qui lui indique ce qui ne va pas. Ils sont moins de 10 étudiants cet après-midi-là, à s’entraîner sous le contrôle avisé du maître clinicien des niveaux techniques.

«J’ai commencé le plongeon à 16 ans et j’ai entamé ici ma carrière d’entraîneur dans cette discipline en 1982. J’ai alors débuté à un rythme d’enfer, travaillant sept jours sur sept sans même m’en rendre compte!» avoue-t-il en précisant qu’aujourd’hui, il a quelque peu ralenti la cadence.

Naît-on bon plongeur ou le devient-on? «C’est vraiment un sport de précision qui requiert bien sûr une grande technique mais, en bout de ligne, le résultat vient avec ce que l’athlète a dans les tripes», répond-il. Vouloir en faire davantage, se donner à fond sans rien négliger de sa vie d’étudiant, voilà les principes d’un athlète qui réussit.

Une performance que l’entraîneur se doit d’encadrer: «J’ai besoin de communiquer avec les athlètes, d’être aussi cette oreille attentive qui peut conjurer leurs peurs ou aider à résoudre leurs problèmes». Et lorsque le doute s’abat sur lui, Dany Boulanger sait comment trouver les réponses: «Nous avons tendance à ne pas suffisamment observer ce qui se passe autour de nous. Et la plupart du temps la solution est là, juste devant nous. Il suffit d’observer et d’analyser.»

Dany Boulanger réfléchit beaucoup aux conséquences de ses actes et aux répercussions que son influence peut avoir auprès des étudiants plongeurs qu’il entraîne. «Le leardership est indispensable, mais c’est en partageant nos connaissances et en prodiguant nos conseils que se forge sous nos yeux le talent d’un athlète qui ira puiser au plus profond de lui-même le courage et la volonté, garants de son succès mais surtout de son intégrité et de son équilibre».

TOUCHER LE MUR

Nicholas Perron a un regard couleur de la mer des Caraïbes et une allure athlétique de jeune premier. Cette nouvelle recrue, promue depuis l’automne 2004 entraîneur-chef de l’équipe de natation du Rouge et Or, n’a pas froid aux yeux et entend bien laisser sa trace au sein de son club.

Le jeune trentenaire (à peine 31 ans!), passionné de littérature, est avant tout un nageur qui envisage son statut de coach comme un processus éducationnel et il n’hésite pas à affirmer que «le sport est un médium pour atteindre des objectifs». Le coordonnateur du programme d’excellence sportive de l’Université Laval, Gilles Lépine, dit de lui qu’il a «le logo du Rouge et Or tatoué sur le cœur!»

Il est vrai que Nicholas Perron a nagé pour le Rouge et Or de 1991 à 1996, année de son retrait de la compétition. Depuis cette époque, Nicholas Perron est devenu un rassembleur dans la région de Québec. Avant de rejoindre le Rouge et Or, il a été, durant huit années, l’entraîneur du Club de natation de compétition de Beauport, l’un des meilleurs clubs. Lorsqu’il parle de son sport, Nicholas Perron fait bien évidemment référence à la puissance, celle des bras, qui permet à l’athlète de «toucher le mur en premier». Il sait aussi «que l’on ne peut tout contrôler et que mon plus grand rôle est certainement d’apprendre aux athlètes à perdre et à gagner.»

Dans cet esprit, le jeune entraîneur ne manque pas de leadership: «Le leadership ne suffit pas. J’essaie au maximum de me servir de mon sens de l’observation, de demeurer ouvert et de tenter de contrôler les éléments extérieurs. Je suis un peu comme une éponge! Mais je crois aussi que l’on ne peut être entraîneur sans posséder cet amour de la compétition», conclut-il.

Certes, Nicholas Perron ne manque pas d’ambition. Avec son équipe, il entend bien faire briller le rouge et l’or aux Championnats du monde aquatique qui se dérouleront à Montréal, en juillet 2005, et montrer ainsi que le goût de la compétition, c’est aussi celui de gagner.

DRIBBLER AU FÉMININ

Sa femme l’affirme, «il a des ballons à la place des poumons» et un véritable cœur d’entraîneur qui bat au rythme du coaching depuis toujours.

Gardien des Aigles Bleus à l’Université de Moncton, Helder Duarte en deviendra l’entraîneur durant une période faste de sept ans au cours desquels il va parfaire son art du jeu et de la psychologie. En 1994, le hasard va le conduire à diriger l’équipe féminine senior du Dynamo de Québec. Très à l’aise avec les gars, l’entraîneur va découvrir toute la complexité d’une équipe féminine.

Pas facile de coacher des filles? Helder Duarte opine de la tête: «J’ai dû réapprendre le coaching! Parce que les filles ont toujours besoin de beaucoup d’encouragement et d’attention!» Avec doigté et patience, l’entraîneur de soccer sait qu’il peut faire des miracles avec son équipe, «mais cela exige beaucoup d’explications, de clarté et de transparence».

Et depuis huit ans, Helder Duarte inscrit son équipe féminine de soccer du Rouge et Or au tableau des finales: «Si j’obtiens des résultats, c’est parce que je suis toujours honnête et respectueux avec elles. Et c’est fou le feu sacré qu’elles démontrent sur le terrain!» Cœur, détermination et conviction constituent ses principaux atouts qui peuvent mener au succès.

Mais pour Helder Duarte, les succès sont vite oubliés. Demeure la tâche parfois délicate et ardue d’un entraîneur «qui doit d’abord être un bon communicateur et savoir établir des relations basées sur la confiance». Et les récompenses? Helder Duarte a l’œil qui se fait tendre: «Je pense vraiment apporter quelque chose à mes joueuses.» Pour preuve, elles sont nombreuses à revenir le voir pour lui signifier combien il a changé leur vie… en mieux!

PREMIER JEU

L’enfant prodigue est revenu au pays en 1996 en tant que coordonnateur à la défensive avant d’enfiler, en 2000, le blouson d’entraîneur-chef de l’équipe de football Rouge et Or. Un rôle qui convient à merveille à Glen Constantin, puisque pour la deuxième année consécutive, son équipe vient de remporter la Coupe Vanier face aux Huskies de la Saskatchewan.

Un travail qu’il n’accomplit pas seul, car le coach tient à rendre hommage, non seulement aux 80 athlètes, mais aussi aux 3 adjoints et 6 entraîneurs qui l’accompagnent. «Je suis un homme de défi», avoue celui qui a fait sa marque au poste de secondeur des Gee-Gees de l’Université d’Ottawa avant de s’embarquer comme entraîneur pour les Gaiters de l’Université Bishop’s et de goûter à l’expérience américaine avec les Cougars de l’Université de Houston au Texas. Durant ces 10 dernières années, Glen Constantin n’a ménagé ni temps ni énergie auprès de son équipe qu’il considère comme sa famille.
 
Passionné par le jeu et les joueurs, il exige néanmoins beaucoup de «ses gars» en dehors du sport. Car les étudiants-athlètes ont des devoirs à faire et des défis académiques à relever pour franchir les verges qui les séparent du terrain: «Nous sommes ici pour former de bonnes personnes et leur permettre de se développer.»

Pour ce faire, ceux qui éprouvent des difficultés peuvent compter sur l’aide d’un «superviseur d’études». Formidable recruteur et fin stratège, Glen Constantin n’a pas son pareil pour repérer les bons athlètes. Toutefois, le candidat devra passer une évaluation de ses ambitions universitaires sans lesquelles le plus talentueux joueur ne foulera jamais le gazon du stade. Et à en juger par les succès que remporte le Club de football du Rouge et Or… le jeu en vaut la chandelle.

AU-DESSUS DU FILET

Quand on est très grand et qu’on déborde d’énergie, les choix s’imposent d’eux-mêmes. Tel a été le cas pour Pascal Clément, qui a commencé le volleyball à l’âge de 13 ans, sans jamais pouvoir s’en détacher. Et pourtant, au PEPS et dans les autres sphères sportives, on connaît l’entraîneur autant pour ses résultats brillants avec son équipe Rouge et Or que pour son amour du théâtre, de l’animation et du cirque.

 Et finalement, n’y aurait-il pas quelque parenté entre l’acteur qui transmet un message et l’entraîneur qui, lui aussi, envoie l’information? Depuis 1992, sur la scène universitaire, le talentueux entraîneur a conduit son équipe à accumuler durant cinq saisons successives des médailles d’or, d’argent et de bronze pour le Rouge et Or. Il a d’ailleurs remporté neuf titres d’entraîneur de l’année au Québec et été choisi comme entraîneur à l’échelle canadienne.
 
 «Un entraîneur doit connaître son sport mais aussi accompagner pédagogiquement ses joueurs», explique ce formidable stratège, toujours disponible pour son équipe, qui encadre ses joueurs avec un brin de paternalisme et se définit en toute franchise comme un grand émotif démontrant son contentement autant que son mécontentement: «Mais en vieillissant je suis arrivé à mieux me contrôler.

J’ai besoin d’échanger avec d’autres et avec mes adjoints notamment.» Son temps libre, il le consacre au montage vidéo numérique. Il utilise avec maestria toutes les nouvelles technologies pour filmer les matchs et les séquencer afin d’en produire un matériel pédagogique «très important» dans son travail.

«Je visionne tout. Pour chaque match, je consacre cinq heures à la vidéo. Cela permet de mieux comprendre les phases de jeu et de mieux préparer les rencontres», ajoute Pascal Clément, qui, devant sa table de montage, ressemble à s’y méprendre à un metteur en scène.

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